Nos raisons de refuser l’arnaque de la RFFA (réforme fiscale et financement de l’AVS) !

Published by Julien Gressot on

Après le refus de la réforme de l’AVS (Assurance-vieillesse et survivants) le 24 septembre 2017 et de celui la RIE III (réforme de l’imposition des entreprises 3e mouture) le 12 février 2017, le Conseil fédéral et le Parlement reviennent avec une nouvelle proposition portant le doux nom de RFFA (réforme de la fiscalité et financement de l’AVS) qui combine les deux thématiques. Vous trouverez ici les raisons qui poussent le Parti ouvrier et populaire (POP) à refuser ce paquet qui ne résout rien et qui conduira à une accentuation des politiques d’austérité au détriment de la population.

La réforme de la fiscalité (RF)

La réforme de la fiscalité est censée permettre de répondre aux nouvelles normes internationales sur la fiscalité et la sous-enchère fiscale. La RFFA propose de diminuer la fiscalité des entreprises tout en supprimant les privilèges fiscaux des multinationales. En contrepartie de l’augmentation de la fiscalité des entreprises bénéficiant actuellement de régimes fiscaux privilégiés, de nouvelles niches fiscales sont introduites pour réduire l’imposition et « rester concurrentiel ». Plusieurs mécanismes seront autorisés en cas d’acceptation de la RFFA : la patent box » pour déduire les frais liés aux brevets et autres droits comparables, la déduction des dépenses de recherche et de développement à la définition peu claire et aux effets fiscaux opaques – il est prévu de permettre une déduction plus grande que les dépenses effectives d’un facteur 1,5, on croit rêver – et la déduction pour « autofinancement » (déduction des intérêts sur le capital propre). De plus, une diminution généralisée de l’impôt sur les entreprises est prévue pour ne pas « rendre la Suisse moins compétitive à l’échelle internationale ». Finalement les dividendes des actionnaires seraient taxées plus fortement. Les effets de ces réformes ne sont pas connus précisément et dépendront de la manière dont les cantons les appliquent, selon la brochure du Conseil fédéral.

Si, sur certains point, le Parti ouvrier et populaire (POP) pourrait entrer en matière, comme sur la suppression des privilèges spéciaux antidémocratiques et mortifère pour les finances publiques de tous les pays, ainsi que sur l’augmentation de l’imposition des dividendes, il ne peut soutenir le projet d’ensemble, car le résultat global estimé est une perte sèche pour la Confédération suisse et les cantons au minimum de deux milliards. De plus, la fin des privilèges fiscaux s’accompagne de nouvelles possibilités d’optimisation fiscale, ce que nous combattons. Rappelons que lors de la réforme fiscale II (RFII), l’estimation des pertes engendrées par la réforme était chiffrée en dizaines de millions par Hans-Rudolf Merz, mais le résultat définitif fut de, d’après l’Administration fédérale, entre 800 millions et 1 milliard de pertes annuelles (certains parlent de davantage encore). Le Tribunal fédéral a même jugé les informations données comme étant de « fausses informations ». Cela risque bien d’être la même chose pour la RFFA. Au vu des montants en question et en raison du flou sur les effets des patents box et autres nouvelles possibilités de déduction, il est nécessaire de demeurer très circonspect sur les effets annoncés, soit une perte de deux milliard, – qui produirait déjà de toute façon une accentuation des politiques d’austérité dans toute la Suisse. Les enjeux sont trop grands pour avaler une nouvelle couleuvre de cette taille ! Faire des cadeaux aux entreprises conduit forcément à des coupes budgétaires dans le social, la culture, la formation, etc., au détriment de la majorité de la population suisse qui devra soit s’en passer, soit augmenter encore ses impôts. Nous ne souhaitons pas que la Suisse demeure à la tête du mouvement de sous-enchère fiscale et de concurrence internationale!

La réforme fiscale est une énorme arnaque vis-à-vis du peuple suisse soutenue par toute la droite (sans surprise) et par le Parti socialiste (sans grande surprise non plus malheureusement) qui montre une fois de plus son visage néolibéral. Un petit susucre est toutefois donné par le Conseil fédéral avec la promesse d’un financement supplémentaire de l’AVS qui ne résout en fait rien à la situation de cette assurance.

La réforme de l’AVS

La réforme de l’AVS est présentée comme urgente, car n’ayant subi aucune réforme majeure depuis vingt ans. Si sur ce point l’argument peut-être entendu, la recette donnée est mauvaise. En effet, cette promesse de financement à hauteur de deux milliards par année de l’AVS sert à faire passer la pilule de la baisse des impôts pour les entreprises. Mais lorsque l’on observe le mode de financement proposé, il y a de quoi tomber des nues. En effet, il y a tout d’abord 800 millions de francs supplémentaires de la part de la Confédération – donc financés par les impôts directs et indirects de la population -, puis 1,2 milliards de francs par le biais d’une augmentation des cotisations AVS de 0,3 point (0,15 pour les salariés et 0,15 pour les employeurs). Le renflouement de l’AVS sera donc financé principalement par la population et les travailleur.se.s alors que les baisses fiscales, dont l’estimation suscite la méfiance, bénéficiera uniquement aux personnes morales et aux actionnaires. C’est donc une arnaque qui ne résout rien durablement. Ce d’autant plus que le futur projet de réforme AVS 2021 (qui devrait passer devant le Parlement déjà cet été) proposera très certainement une augmentation de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans et une augmentation de la TVA pour compléter le financement de l’AVS. C’est également une supercherie, car les rentes, affreusement basses à l’heure actuelle et insuffisantes pour vivre décemment, ne seront pas augmentées par ce projet !

La proposition du POP: intégrer le second pilier dans le premier pour un renforcement durable de l’AVS
Sur ce point et pour mémoire, Le POP milite toujours en faveur d’une intégration du deuxième pilier dans l’AVS pour permettre un véritable renforcement durable de l’assurance vieillesse et invalidité. Cela serait favorable aux femmes qui se trouvent souvent pénalisées par le second piller et socialement juste car cela profiterait à toutes et à tous au contraire de la situation actuelle.

Un non-respect de l’unité de matière

Il est également important de relever que lier deux objets différents dans une votation par le biais d’une initiative serait refusé au nom du non-respect de l’unité de matière. Dans ce cas, lorsque la proposition provient du Conseil fédéral, cela passe comme une lettre à la poste. Il est bien clair aux yeux du POP que ce procédé n’est pas démocratique.

Une Manipulation mensongère
Le POP tient également à dénoncer la brochure réalisée par le comité de soutien à RFFA qui montre des graphiques faisant croire que la fin des privilèges fiscaux des entreprises multinationales compensera la baisse générale de la fiscalité des entreprises. C’est un mensonge, la réforme coûtera au grand minimum 2 milliards de CHF, avec toutes les réserves évoquées ci-dessus quant à l’estimation de ce chiffre.

source: comité de soutien à RFFA (sur www.avs-fiscalite-oui.ch), p.8 du dossier aux médias, consulté le 4 mai 2019.

Ce graphique, également présenté dans un tout-ménage reçu par la population, fait croire que les pertes sont compensées par l’augmentation d’impôt des entreprises actives à l’international, mais il s’agit d’une infâme manipulation mensongère : 2 milliards au minimum seront perdus !

Le POP déplore une fois de plus que le Parti socialiste suisse (PSS), moins la section genevoise, suive cette mouvance néolibérale et partage la volonté de faire des cadeaux aux entreprises. Ces baisses profitent aux actionnaires pas aux travailleur.se.s qui créent pourtant la richesse. Il est nécessaire d’avoir une gauche forte défendant les acquis sociaux et en revendiquant d’autres, plutôt qu’un PS servant de paillasson à la droite en soutenant la politique des caisses vides tout en vantant les vertus du consensus helvétique et en proposant des coupes antisociales abominables comme le fait, par exemple, le Parti socialiste neuchâtelois (PSN) dans le Canton de Neuchâtel depuis plusieurs années.

RIE3, RFFA: Non c’est Non ! Non à une nouvelle arnaque fiscale !

Julien Gressot